Les comptes déposés aux greffes sont-ils accessibles en open data ?

Publié le 9 juillet 2025 I financement I Rédigés par Juliette Veillon et Lukas Hinteregger

Chaque année, les sociétés commerciales sont tenues de déposer leurs comptes annuels auprès du registre du commerce et des sociétés (RCS). Cette obligation vise à garantir la transparence financière du tissu économique. Une fois réceptionnés par les greffes des tribunaux de commerce, ces comptes font l’objet d’une publication au Bodacc. Mais que deviennent-ils ensuite ? Sont-ils librement accessibles ? À qui et dans quelles conditions ?

I. Une obligation légale entre transparence et confidentialité

A. L’obligation de dépôt des comptes annuels

Les articles L.232-21 à L.232-23 du Code de commerce imposent aux sociétés commerciales de déposer chaque année leurs comptes annuels auprès du tribunal de commerce dont elles dépendent.

Le non-respect de cette obligation peut entraîner des sanctions : amendes (jusqu’à 1 500 €), injonctions, voire dissolution dans les cas extrêmes.

B. Option de confidentialité des comptes

L’article L.232-25 du code de commerce permet à certaines entreprises de demander à ce que leurs comptes annuels ne soient pas rendus publics. Cette confidentialité s’applique uniquement sur option aux micro-entreprises et petites entreprises.

    • Micro-entreprises : confidentialité totale des comptes annuels (bilan, compte de résultat et annexe), sauf pour certaines sociétés évoluant dans le secteur financier (banques, assurances, etc.).
    • Petites entreprises : possibilité de rendre confidentiel uniquement le compte de résultat.
    • Moyennes entreprises : pas de confidentialité possible, mais option de présentation simplifiée du bilan et de l’annexe.
    • Grandes entreprises : aucune confidentialité possible.

 

En résumé :

Taille d’entreprise Seuils de définition Confidentialité possible ?
Total du bilan Montant net du chiffre d’affaires Effectif au cours de l’exercice
Micro-entreprise 450 000 € 900 000 € 10 salariés Oui, sur l’ensemble des comptes
Petite entreprise 7,5 millions € 15 millions € 50 salariés Oui, sur le compte de résultat uniquement
Moyenne entreprise 25 millions € 50 millions € 250 salariés Non, mais présentation simplifiée possible
Grande entreprise Supérieur à 25 millions € Supérieur à 50 millions € Plus de 250 salariés Non

Source des seuils : https://entreprendre.service-public.fr/actualites/A17100

C. Rehaussement des seuils de confidentialité

Le 28 février 2024, un décret a rehaussé les seuils permettant de classifier les entreprises, en réponse à l’inflation et en application d’une directive européenne (directive déléguée (UE) 2023/2775). Cette évolution permet à un plus grand nombre d’entreprises d’activer l’option de confidentialité, modifiant ainsi l’équilibre entre données publiques et privées[1].

D. Nombre de comptes déposés et publiés

D’après les statistiques d’Infogreffe, plusieurs millions de comptes sont déposés chaque année par les sociétés immatriculées en France. Toutefois, une part significative de ces comptes ne sont pas publiés en raison des options de confidentialité exercées.

En 2024 on comptait :

  • 1,9 millions de comptes déposés
  • dont 0,5 million de bilans publics (cette part de comptes non confidentiels a baissé, notamment à cause des rehaussement des seuils – voir ci-dessus)

Source : Infogreffe

[1] https://www.legalvision.fr/cabinet-formalites-juridiques/tribune-juridique/rehaussement-des-seuils-et-confidentialite-des-comptes-quel-impact-pour-les-entreprises/

II. L’accès aux comptes déposés aux greffes : entre sources officielles et acteurs privés

Les données financières issues des comptes annuels, qui alimentent le registre national du commerce et des sociétés tenu par l’Inpi, sont accessibles gratuitement en vue de leur réutilisation par tout acteur du secteur public ou privé souhaitant créer de nouveaux services ou activités[1].

A. Accès aux comptes publics

Les comptes rendus publics peuvent être consultés via des canaux officiels (Infogreffe, greffes des tribunaux). Cet accès est généralement payant et parfois fragmenté.

Depuis quelques années, certains jeux de données sont accessibles en open data via API. Cela concerne uniquement les comptes rendus publics.

B. Des intermédiaires valorisent ces données

Des entreprises comme Societe.com, Pappers ou Atometrics s’appuient sur ces sources pour proposer des services à haute valeur ajoutée : visualisation simplifiée, indicateurs financiers, comparaison sectorielle, etc.

Ils permettent ainsi une appropriation plus large de ces données par des publics non spécialistes – investisseurs, entrepreneurs, journalistes économiques, etc.

[1] https://www.efl.fr/actualite/open-data-donnees-comptes-annuels-issues-rcs-reutilisables-gratuitement_UI-63301389-9b3b-45da-bf13-17fc8d29066f

III. L’accès aux comptes confidentiels : u usage professionnel strictement encadré

A. Un accès restreint à certaines professions spécifiques

Les comptes déposés sous option de confidentialité ne sont pas librement accessibles au public, mais ils peuvent néanmoins être consultés par certains acteurs habilités, notamment dans le cadre d’activités financières, bancaires ou d’évaluation de crédit. Cet accès, strictement encadré par la réglementation, permet de répondre à des besoins spécifiques d’analyse et de gestion des risques, tout en respectant la confidentialité choisie par les entreprises concernées.

Des prestataires spécialisés peuvent ainsi exploiter ces données pour fournir à leurs clients des analyses sectorielles et des indicateurs financiers plus précis, contribuant à une meilleure compréhension du tissu économique sans compromettre la protection des informations sensibles.

B. L’exemple d’Atometrics : valoriser les données en toute conformité

Atometrics, prestataire au service des acteurs financiers dont notamment des établissements bancaires, est habilité à accéder aux comptes confidentiels. Cet accès permet d’effectuer des analyses plus fines, en particulier sur des secteurs peu transparents dans l’open data.

Atometrics peut ainsi calculer des indicateurs sectoriels précis, à partir d’un panel filtrable selon :

  • Taille (tranche de chiffre d’affaires, effectif)
  • Localisation
  • Régime fiscal
  • Année fiscale

Les bénéfices sont multiples : meilleure connaissance des marchés, outils d’aide à la décision, appui aux politiques publiques, valorisations plus précises, estimation des tailles de marchés ultra-locales et bien plus.

Au-delà de ces gains de précision, l’accès aux comptes confidentiels rend possible le développement de nouvelles fonctionnalités telles que le credit scoring. Ce score, construit à partir de données financières couplées à des données de marché, contribue à la prévention des défaillances grâce à un premier niveau d’alerte et offre un outil d’évaluation pour sécuriser les relations commerciales.

Il contribue également à la constitution de panels filtrés encore plus pertinents et peut alimenter des analyses statistiques macro pour identifier des zones géographiques ou secteurs d’activité présentant des fragilités spécifiques.

Conclusion

Les comptes déposés aux greffes ne sont pas intégralement en open data : seuls les comptes publics le sont.

Les comptes déposés de manière confidentielle restent protégés, bien que certains acteurs professionnels puissent y accéder dans un cadre réglementaire stricte.

Atometrics propose une alternative puissante à l’open data classique : accéder légalement à une information confidentielle, la traiter de manière sécurisée et en tirer une intelligence économique utile pour l’ensemble du marché, tout en respectant la confidentialité des petites entreprises.

Juliette Veillon

Juliette, data scientist chez atometrics, apporte son expertise dans la collecte, le traitement, la modélisation et l'interprétation des données.

Lukas Hinteregger

Lukas, co-fondateur d’atometrics, développe les outils de la plateforme en s’appuyant sur son expérience en conseil économique et sur une fine connaissance des enjeux territoriaux.


Pour aller plus loin :