Le deuxième article de la série proposée par atometrics et la Fédération des Centres de Gestion Agrées (FCGA), analyse les impacts du covid-19 sur l’activité des petites entreprises de proximité au premier trimestre 2020.
Dans cet article, nous tentons d’analyser l’impact du covid-19 sur le premier trimestre 2020 pour 5 secteurs traditionnels suivis par l’Observatoire de l’Attractivité des Villes pour les Petites Entreprises[1]:
- Le CHR (Cafés, Hôtels, Restaurants)
- L’artisanat service
- Le commerce non alimentaire
- Le commerce alimentaire
- L’artisanat BTP & Fabrication
Vision globale
Le graphique ci-dessous présente l’évolution du chiffre d’affaires HT (« CA HT » ou « CA ») pour ces 5 secteurs au cours des trois premiers mois de l’année 2020 par rapport à la même période en 2019.
Le CA HT des sociétés contenues dans le panel (tous secteurs confondus) au premier trimestre 2020 affiche une baisse d’environ 10% par rapport au premier trimestre 2019.
Observations sur les mois de janvier et février 2020
- Les sociétés du panel montraient une croissance médiane positive (voire supérieure au rythme de celle de l’économie française) sur les mois de janvier et février 2020 pour tous les secteurs (à l’exception du commerce non alimentaire en janvier).
- Il existait néanmoins quelques disparités entre :
- des secteurs particulièrement performants : le commerce alimentaire, le CHR et l’artisanat de service, et
- des secteurs ayant une croissance plus contrastée : le commerce non alimentaire et l’artisanat BTP & fabrication
Observations sur le mois de mars 2020
- Prises dans leur ensemble (tous secteurs confondus), les sociétés du panel ont subi une chute de plus d’un tiers de leur CA HT en mars 2020 par rapport au même mois de l’année précédente.
- Des différences importantes apparaissent entre :
- les secteurs du CHR et de l’Artisanat Service pour lesquels la baisse de CA est supérieure à 50%, et
- les secteurs de l’Artisanat BTP et Fabrication, du Commerce Alimentaire et du Commerce non-Alimentaire pour lesquels la baisse est comprise entre 5% et 15%
Rappel sur la situation fin 2019
- A la veille de cette crise sans précédent, les TPE – comme nous l’avions décrit dans notre article précédent – pouvaient bénéficier des efforts consentis depuis 2015 pour améliorer leur solvabilité et leur autonomie financière.
- Elles avaient ainsi en partie restaurée leur capacité d’emprunt.
Interprétation
Les résultats en janvier et février 2020 témoignent globalement de la bonne dynamique affichée par la plupart des secteurs avant la crise liée au Covid.
Les évolutions observées sur le mois de mars 2020 traduisent quant à elles l’impact des ordonnances de fermetures administratives et de restrictions de circulation mises en place à compter du 15 mars :
- Sans surprise, ces impacts sont particulièrement importants pour les entreprises des métiers du CHR et de l’Artisanat-Service du fait de leur plus grande exposition à ces mesures et aux modifications de comportements des consommateurs.
- Dans l’ensemble, les secteurs de l’artisanat BTP Fabrication ou des commerces alimentaires et non-alimentaires ont pu limiter la baisse en repositionnant leur offre ou en continuant leur activité en mode dégradé.
Toutefois, les 5 secteurs étudiés regroupent des métiers aux caractéristiques parfois hétérogènes. Pour appréhender plus finement l’impact de la crise, il est nécessaire de l’analyser au niveau des métiers qui composent chacun de ces secteurs.
- En effet, pour certaines activités dans les secteurs des commerces non-alimentaires (habillement) et de l’artisanat BTP & fabrication, une baisse d’activité était même déjà perceptible dès les mois de janvier et février.
- A contrario, certaines activités comme les pharmacies ou l’alimentation générale ont vu leur niveau progresser y compris au cours du mois de mars.
Pour les activités les plus impactées, les réserves de trésorerie pourraient ne pas être suffisantes dans de nombreux cas et ce malgré les mesures de soutien prises par les pouvoirs publics ou les banques (avec des reports d’échéances notamment).
Les données disponibles à ce jour (premier trimestre 2020) nous permettent uniquement d’observer l’impact du covid-19 sur les 15 premiers jours de confinement. L’analyse des données relatives aux mois d’avril et de mai permettront d’appréhender l’impact direct des restrictions de circulation et des mesures des fermetures administratives de manière plus exhaustive et feront l’objet de prochains articles.
Les paragraphes suivants proposent une analyse détaillée de l’impact de la crise liée au Covid-19 sur une sélection de métiers composant chacun des 5 secteurs couverts par cet article.[2]
CHR (Cafés, Hôtels, Restaurants)
Le panel de sociétés évoluant dans le secteur des Cafés, Hôtels, Restaurants a subi une perte globale de CA de -14,7% sur le premier trimestre 2020 par rapport au premier trimestre 2019.
Le tableau ci-dessous présente l’évolution du CA HT des différents métiers regroupés dans ce secteur : la restauration, l’hôtellerie, les cafés et les buralistes au cours des trois premiers mois de l’exercice 2020 :
Observations sur les mois de janvier et février 2020
- Lors des deux premiers mois de l’année, la majorité des métiers, exception faite de l’hôtellerie, affichait de très bons résultats en comparaison avec l’exercice précédent.
- La baisse de -1,5% de CA observée pour l’hôtellerie en février témoigne d’une modification des comportements et de l’effet des restrictions engagées par les premiers pays touchés par le Covid-19 (Asie).
Observations sur le mois de mars 2020
- Au mois de mars 2020, seul le commerce de détail de produits à base de tabac en magasin spécialisé (buralistes) a connu une hausse d’activité (+1,6%). Pour les autres métiers du CHR, la baisse du CA par rapport à l’année précédente est comprise entre -44,8% pour les débits de boissons et -57,6% pour la restauration traditionnelle.
- Les métiers de la restauration traditionnelle et de l’hôtellerie ont été les plus fortement impactés par les mesures de fermetures administratives et de restrictions de circulation mises en place à compter du 15 mars 2020. La baisse de CA observée sur ce mois résulte de la perte enregistrée sur les 15 derniers jours du mois de mars mais également d’une fréquentation plus faible avant les mesures de confinement.
- Ces secteurs ne bénéficieront pas, a priori, d’un fort effet de rattrapage. Néanmoins, certains établissements des métiers de la restauration rapide et traditionnelle ont pu limiter la baisse de leur activité en diversifiant leur offre grâce à la livraison et la vente à emporter.
Rappel sur la situation fin 2019
-
- Au cours de la période 2015-2019, la production de trésorerie a diminué pour s’établir à 8,8% du CA HT.
- Sur la même période, le poids des dettes financières a baissé tandis que le poids des fonds propres a augmenté et représentait 34% du total bilan en 2019.
- La trésorerie disponible était de 43 jours (en médiane) en 2019, en augmentation par rapport à 2015 (27 jours).
Globalement, grâce à leurs efforts, les entreprises du secteur du CHR bénéficiaient d’une capacité d’endettement restaurée pour affronter la crise (cliquez ici pour accéder à une infographie sur la santé financière des petites entreprises à la veille de la crise liée au Covid).
Artisanat service
Le secteur de l’artisanat service est celui qui a été le plus fortement impacté au premier trimestre avec une perte de CA de -16% par rapport au premier trimestre 2019.
Le tableau ci-dessous détaille l’évolution du CA HT observée sur les principaux métiers regroupés dans le secteur de l’artisanat-service au cours des trois premiers mois de l’année 2020 :
Observations sur les mois de janvier et février 2020
- Au cours des deux premiers mois de l’année les activités de soins de beauté et de coiffure d’une part et les activités photographiques d’autre part se caractérisaient par des taux de croissance soutenus (supérieurs à, respectivement, +3% et +8%).
- Les autres activités montraient des évolutions plus volatiles avec la présence systématique d’un mois en recul par rapport à l’année précédente.
Observations sur le mois de mars 2020
- La majorité des activités du secteur montrent des baisses de CA HT supérieures ou égales à 50% sur le mois de mars. Il est d’ailleurs notable que les 3 activités (soins de beauté, coiffure, activités photographiques) affichant la meilleure performance en janvier et février sont celles qui ont montré la plus forte baisse le mois suivant.
- Les métiers de l’entretien et de la réparation de véhicules automobiles légers, du transport de voyageurs (taxis) et de la réparation mécanique ont été relativement moins impactés.
Rappel sur la situation fin 2019
- Les entreprises du panel évoluant dans le secteur de l’artisanat service disposaient d’une trésorerie médiane de 45 jours de CA HT en 2019 (cliquez ici pour accéder à une infographie sur la santé financière des petites entreprises à la veille de la crise liée au Covid).
Commerce non alimentaire
Sur le premier trimestre 2020, le commerce non alimentaire est globalement en recul de -4.6% par rapport au premier trimestre 2019. Ce résultat, relativement bon en comparaison avec les autres secteurs, s’explique par la bonne performance des pharmacies qui sont surreprésentées dans le panel analysé. En excluant les pharmacies, la croissance de l’activité du commerce non-alimentaire pour le mois de mars descend à -52%.
Le tableau ci-dessous détaille l’évolution du CA HT observée sur les principaux métiers regroupés dans ce (habillement, électroménager, presse, produits pharmaceutiques) au cours des trois premiers mois de l’exercice 2020 :
Observations sur les mois de janvier et février 2020
- Plusieurs métiers ont connu une baisse d’activité avant même la mise en place de mesures administratives. C’est notamment le cas des commerces liés à l’habillement, de l’optique voire des commerces de journaux et de la papeterie.
- Les autres métiers du secteur montraient quant à eux une bonne dynamique en janvier et février.
Observations sur le mois de mars 2020
- La baisse de CA au mois de mars est très sensible pour l’ensemble des secteurs, à l’exception notable des pharmacies.
- Les métiers de la mode et de l’habillement affichent une baisse de CA comprise entre 53% et 65% par rapport à mars 2019.
- Les pharmacies ont quant à elles bénéficié d’une augmentation de CA en mars (+9,7%). Cet accroissement d’activité est imputable à la forte demande en matériel de protection (masques chirurgicaux et gels hydro alcooliques) ainsi qu’à un probable effet stockage.
Rappel sur la situation fin 2019
- L’assainissement du bilan des sociétés ainsi que l’amélioration de leur trésorerie ont permis de restaurer et augmenter leur capacité d’endettement (cliquez ici pour accéder à une infographie sur la santé financière des petites entreprises à la veille de la crise liée au Covid).
- Le secteur du commerce non alimentaire a connu de bons résultats au cours des 5 exercices précédents :
- Les dettes financières étaient en baisse et représentaient 12,0% du total bilan
- Sur cette même période, les fonds propres des sociétés du panel évoluant sur ce secteur ont fortement augmenté, passant de 30,9% du total bilan à 45,9% du total bilan.
- Les sociétés de ce secteur disposaient d’une trésorerie médiane représentant 36 jours de trésorerie en 2019.
- L’assainissement du bilan des sociétés ainsi que l’amélioration de leur trésorerie ont permis de restaurer et augmenter leur capacité d’endettement (cliquez ici pour accéder à une infographie sur la santé financière des petites entreprises à la veille de la crise liée au Covid).
Commerce et artisanat alimentaire
Le secteur du commerce alimentaire dans son ensemble a connu une baisse de CA de -0,8% sur le premier trimestre 2020 par rapport au premier trimestre 2019.
Le tableau ci-dessous détaille l’évolution du CA observée sur les principaux métiers regroupés dans le secteur des commerces d’alimentation de proximité au cours des trois premiers mois de l’exercice 2020 :
Observations sur les mois de janvier et février 2020
- A l’aune de la crise, l’ensemble des métiers connaissaient une croissance positive voire nettement supérieure au rythme de la croissance du PIB français.
- 4 activités (pâtisserie, commerce de détail de boissons en magasin spécialisé, commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés et autres commerces de détail alimentaires en magasin spécialisé) montraient même une croissance supérieure à +9% en février ce qui pourrait résulter d’un changement de comportant et/ou à un effet stockage.
Observations sur le mois de mars 2020
- Les pâtisseries et cavistes du panel ont subi une baisse de CA supérieure à -40% par rapport au mois de mars 2019.
- Tout au contraire, les commerces d’alimentation générale et les boucheries ont fortement bénéficié des changements d’habitudes induits par le confinement et ont affiché une croissance de, respectivement, +11,4% et +16,9% !
- Les métiers de la boulangerie ont été impactés par une baisse de la demande de la part de clients particuliers mais également professionnels (hôtels, restaurants, restauration collective) tandis que les commerces de détail alimentaires sur éventaires et marchés étaient concernés par des fermetures administratives dans certains lieux. Ils ont tous deux connu une baisse de CA de l’ordre de -15%.
Rappel sur la situation fin 2019
- Bien qu’elles aient réussi à améliorer leur trésorerie entre 2015 et 2019, les sociétés du secteur du commerce et de l’artisanat alimentaire sont celles qui montraient les réserves de trésorerie les plus faibles. En 2019, elles disposaient en médiane de l’équivalent de 29 jours de CA HT
- Par ailleurs, les sociétés de ce secteur n’ont pas vu leur structure de financement évoluer : les dettes financières sont passées de 18,5% du total bilan en 2015 à 14,2% en 2018 avant de remonter en 2019 pour atteindre 19%.
- Au cours de la période 2015-2019, leurs fonds propres ont augmenté et représentaient 36,5% du total bilan en 2019, principalement du fait de la baisse du niveau des dettes fournisseurs.
- Par rapport aux autres secteurs, la marge de manœuvre globale des entreprises opérant dans le secteur du commerce alimentaire semble plus limitée, du fait d’une structure financière et d’une trésorerie moins favorables (cliquez ici pour accéder à une infographie sur la santé financière des petites entreprises à la veille de la crise liée au Covid).
Artisanat BTP et Fabrication
Dans son ensemble, pour les TPE, le secteur du BTP a été l’un des secteurs économiques les moins touchés sur la période analysée. Le CA HT des entreprises du panel sur le premier trimestre 2020 est stable par rapport au premier trimestre 2019.
Le tableau ci-dessous détaille l’évolution du CA HT observée sur les principaux métiers regroupés dans le secteur de l’artisanat BTP & de la fabrication au cours des trois premiers mois de l’exercice 2020 :
Observations sur les mois de janvier et février 2020
- La performance des différents métiers au cours des deux premiers mois de l’année est disparate.
- Dans l’ensemble, tous les métiers du secteur sont caractérisés par une volatilité importante à l’exception des travaux de terrassement courants et travaux préparatoires et (dans une moindre mesure) des travaux de peinture et vitrerie qui montraient un niveau de croissance continu.
Observations sur le mois de mars 2020
- Certains marchés (commerce de motocycles, ameublement et charpente) ont été plus fortement impactés que d’autres du fait de l’absence de mesures de continuité de l’activité contrairement aux entreprises du bâtiment et des travaux publics.
- Les entreprises de gros œuvre semblent avoir été moins pénalisées que les entreprises réalisant des chantiers de second œuvre.
- En effet, les entreprises de gros œuvre ont subi une chute de CA HT allant de -3,7% à -24,1% en mars 2020 par rapport à l’exercice précédent. Néanmoins, elles pourraient bénéficier d’un effet de rattrapage avec la mise en place de mesures visant à augmenter la flexibilité du travail.
- Toutefois, la diminution des achats de logements neufs et anciens durant la période de confinement pourrait avoir un impact retardé sur ces secteurs.
Rappel sur la situation fin 2019
- Entre 2015 et 2019, les entreprises du secteur de l’artisanat du BTP et de la fabrication ont connu une détérioration de leur capacité à générer de la trésorerie. Elle représentait 7,8% du CA HT en 2019 contre 8,3% en 2015. Les entreprises de ce secteur disposaient d’une trésorerie médiane équivalente à 51 jours de CA HT en 2019.
- Sur la même période, les dettes financières sont restées stables et représentaient 6,6% du total bilan en 2019 tandis que le niveau de fonds propres s’établissait à 48,5% du total bilan (soit le niveau le plus élevé des 5 secteurs).
- Les entreprises évoluant dans ce secteur semblaient donc être dans une situation favorable pour avoir recours à un financement externe en cas de besoin (cliquez ici pour accéder à une infographie sur la santé financière des petites entreprises à la veille de la crise liée au Covid).
[1] Ces analyses ont été effectuées sur la base des déclarations de TVA d’un panel de 9 908 entreprises.
[2] Les secteurs sélectionnés intègrent des observations sur un minimum de 30 entreprises.
Sources :
https://www.economie.gouv.fr/mesures-soutien-restaurants-cafes-hotels-entreprises-tourisme#
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